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Cabinet Comptable Antoine Ghigo

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Étude > Quelques portraits

Quelques portraits

1 - M&D, société d’aide à domicile
2 - Solus, cours de soutien pour enfants et adultes
3 - Viadom, Quinze ans d’expérience dans les services à domicile
4 - Ceka Services, le sens du service au féminin

1 - M&D, société d’aide à domicile

M&D est une société spécialisée dans l’activité auxiliaire de vie auprès des personnes âgées et/ou dépendantes, et qui fonctionne en mode prestataire. « M&D... a pour unique ambition de proposer une aide de qualité, adaptée aux besoins quotidiens des personnes, pour leur permettre de rester le plus longtemps possible chez elles... »
D’emblée et dans la première phrase de présentation figurant sur la plaquette remise aux clients, M. Mazet exprime clairement les objectifs de l’entreprise qu’il a créée en 2003. Expert-comptable et consultant pendant quinze ans de très grands cabinets de conseil en organisation, Michel Mazet imagine le concept et prépare le dossier de M&D pendant trois ans. Il associe une amie, Marie-Clotilde Defives (le « D » de M&D), qui conserve son emploi salarié par ailleurs. Elle participe financièrement à l’entreprise à hauteur de 40 % et apporte encore aujourd’hui son soutien à la bonne marche de l’affaire. En 2002, M. Mazet est licencié de son entreprise et part avec une indemnité de licenciement qu’il investira dans la future société. Il choisit le statut de SAS (société par actions simplifiée) avec un capital de 112 875 €. Le dossier est impeccable (sa force d’expert-comptable) mais les banques refusent tout financement, frileuses par rapport au secteur d’activité des services à la personne. Quelques amis, chefs d’entreprise eux-mêmes, lui font alors confiance et lui prêtent de l’argent pour démarrer.
D’emblée, le jeune créateur voit grand : des bureaux dans un centre d’affaires boulevard Haussmann à Paris, le choix d’une communication onéreuse (25 000 € investis depuis 2003), une secrétaire et deux chargées de clientèle à temps complet, des employées embauchées en CDI. Le besoin de financement est monté jusqu’à 400 000 €. Aujourd’hui, Michel Mazet reconnaît qu’il aurait pu restreindre certains postes budgétaires et diminuer les besoins d’environ 100 000 €. Tous ces chiffres s’accordent en réalité avec la vision de l’entrepreneur : proposer d’emblée le service le plus adapté à la demande des familles et à un tarif qui permettra de rémunérer un personnel qualifié, motivé et disponible.
Le constat de M. Mazet est simple : il considère que le service offert par sa société est le service qui répond aux désirs des personnes âgées : que la même personne soit présente, jour après jour, à l’heure convenue, pour mettre ses compétences techniques au service du client. Or, pour répondre à cette demande, que faut-il ? Des employées compétentes (à domicile, les familles préfèrent l’intervention d’une femme pour son image plus maternelle et plus douce), expérimentées, autonomes, motivées et qui possèdent toutes les qualités humaines indispensables au bien-être des personnes âgées ou dépendantes (ce qui ne s’improvise pas !). Et pour recruter, employer et conserver de telles perles, il leur propose un emploi en CDI, rémunéré au minimum au Smic (3/4 des 18 employées actuelles le sont à temps plein), majoré de primes à l’heure travaillée, de primes pour dimanches et jours fériés et d’une prime exceptionnelle de fin d’année (pour certaines il s’agit d’un véritable 13e mois). Tout confondu, les salariées reçoivent une rémunération d’environ 30 à 40 % supérieure à ce qui se pratique dans ce secteur. Le financement de telles charges salariales a d’emblée nécessité un prix de prestation plus élevé qu’ailleurs, soit 28 € TTC de l’heure en semaine et 35 € TTC les dimanches et jours fériés (NDLR : à noter que ces tarifs se pratiquent couramment dans d’autres domaines de services à la personne).
L’idée maîtresse qui soutient toute la politique de l’entreprise est d’apporter de la valeur ajoutée aux familles. Cette valeur ajoutée consiste à satisfaire au maximum les demandes de la famille (choix des horaires, de la durée et de la fréquence, contrat client à durée déterminée ou indéterminée), à fonctionner en mode prestataire (la famille n’est pas l’employeur), à avoir des auxiliaires de vie professionnelles et responsables, et enfin à proposer une organisation privilégiant l’efficacité et la satisfaction des clients.
Cette idée maîtresse est développée dans le rapport Délos rédigé par le Commissariat général au Plan en mai 2005. Ce rapport a pour objectif de comparer l’offre actuelle de services à la personne (gré à gré, association, entreprise, franchise, travail temporaire, mode mandataire ou prestataire...) et d’analyser laquelle est la plus capable de répondre à la forte croissance prévisible de la demande. La recommandation est d’encourager l’initiative individuelle privée, sous forme d’entreprise locale, en mode prestataire, apportant un service supérieur à l’autoproduction familiale d’aide aux personnes âgées. Ce service à forte valeur ajoutée aura un prix plus élevé, que les familles accepteront de payer, ce qui permettra de rémunérer plus correctement les salariées et donc d’attirer vers ce vrai métier des personnes de plus en plus compétentes. En résumé, chez M&D l’activité d’aide à domicile est un vrai métier qui apporte un service à forte valeur ajoutée pour ses clients. Pour faire bénéficier ses clients des réductions d’impôt liées au service à domicile, il demande et obtient l’agrément simple, puis l’agrément qualité dans les départements où s’exerce l’activité : Paris et cinq départements de la région parisienne (78, 92, 93, 94, 95).
Plusieurs freins existent mais n’empêchent pas le développement régulier de l’entreprise :

- Le recrutement est ardu : pour une annonce passée dans la presse, Deux cents CV arrivent au bureau chaque semaine. Vingt d’entre eux sont retenus, qui débouchent sur une embauche. M. Mazet explique ce phénomène par le fossé entre l’apparente facilité du métier qui attire beaucoup de personnes peu compétentes et l’incontournable réalité de la difficulté à exercer ce métier, sur laquelle il insiste auprès de chaque candidate. Il réfléchit d’ailleurs, en association avec le cabinet de formation de B.Croff (voir adresse en fin de dossier), pour concevoir une formation adaptée à sa demande.
- La difficulté à se faire connaître : le budget publicitaire de 25 000 euros semble avoir été dépensé en pure perte. Le bouche-à-oreille se fait lentement et les prescripteurs ne sont pas évidents à convaincre.
- Enfin, avec le tarif pratiqué (et malgré les déductions possibles pour le client), il faut savoir argumenter pour convaincre, et se placer par rapport à la concurrence.
De fait, l’entreprise vient juste d’atteindre, avec 1 000 heures fournies par mois, son seuil de rentabilité avec un CA de 300 000 euros en 2005 (qui a autorisé M. Mazet à percevoir son premier salaire). La prévision pour 2006 est de 450 000 à 600 000 €.

Viendra alors le moment de développer M & D, via un réseau de partenaires partageant les mêmes valeurs et permettant de s’étendre en province. Pour Michel Mazet, il ne s’agit pas de grandir à tout prix puis d’être racheté par un grand groupe qui lui assurerait un « matelas doré ». Il envisage son entreprise comme le prolongement de lui-même, qui lui permettra d’arriver sereinement à l’âge de la retraite (il n’a que 50 ans), avec le plaisir d’avoir accompli une tâche bénéficiant d’une forte valeur ajoutée humaine : les lettres fréquentes de remerciements, la satisfaction des employées représentent un moteur puissant. Qu’il relativise avec humour en évoquant sa très grande implication personnelle qui a parfois fait trembler son épouse !

2 - Solus, cours de soutien pour enfants et adultes

Tout jeune entrepreneur de 30 ans, David Ricordel n’en dispose pas moins d’une solide expérience dans les cours scolaires dispensés aux enfants. Étudiant, il débute cette activité en 1992, en donnant des cours de maths, physique, chimie et biologie pour se faire de l’argent de poche. Fort de son diplôme d’ingénieur « environnement », il continue de donner des cours du soir, alors même qu’il travaille à temps complet. Autant dire que cette activité est alors pour lui une véritable passion. À tel point que, démissionnaire de son entreprise, c’est tout naturellement qu’il envisage de professionnaliser son passe-temps. Il sait qu’il a envie d’entreprendre et de se retrouver seul aux commandes. Il quitte la région parisienne en 2002 dans le cadre du regroupement familial (grâce auquel, même démissionnaire, il est indemnisable par les Assedic) et s’installe dans une commune de Haute-Garonne : Villemur-s/Tarn. Il se trouve alors face à un dilemme : soit il crée une entreprise, mais n’a pas le moindre sou vaillant pour démarrer, et il sait qu’il devra se battre pour obtenir un financement, soit il saisit l’occasion que lui offre la mairie de son village. En effet, celle-ci lui propose, s’il crée son activité sous forme associative, de bénéficier d’une salle de cours prêtée par la mairie et de prétendre à des subventions. Il se met en relation avec une association toulousaine, CBE du NET (Comité du bassin pour l’emploi du Nord-Est- toulousain), qui va l’accompagner sans discontinuer dans la réalisation de son projet. Il bénéficiera même, par le biais de cette association, de plusieurs formations dont « l’évaluation de projet » et « la communication marketing ». Il effectue seul son étude de marché locale, ce qui lui permet de réaliser que le seul soutien scolaire ne sera pas suffisamment rémunérateur.
Fort de la participation de trois personnes de son entourage à la création d’une association, il accepte alors la proposition de sa mairie et, en 2003, Solus voit le jour. À l’offre de base de soutien scolaire, l’association ajoutera progressivement des compléments de formation pour adultes, et depuis peu, un conseil en évaluation et suivi de projets. Les cours sont donnés soit à domicile, en individuel ou par groupes de trois à cinq élèves, ou en salle, à Villemur. Les tarifs, progressifs, vont de 26 e en individuel en salle au niveau collège jusqu’à 34 € à domicile au niveau lycée. Au niveau lycée, par exemple, un cours collectif est facturé 18 € par personne pour deux élèves et 13 € par personne pour trois élèves. Les élèves qui habitent Villemur sont en majorité scolarisés au lycée de Montauban, distant seulement de 24 km. En 2004, M. Ricordel obtient l’agrément simple « services à la personne à domicile ». Il bénéficie de l’ancien statut qui permettait de souscrire à l’agrément même en exerçant en multiactivités. Depuis la loi Borloo de 2005, ce n’est plus possible. À la différence de ce qui vient d’être mis en place, les formalités d’alors sont très lourdes et longues. Il faut produire une comptabilité analytique pour chacune des activités exercées. L’agrément simple permet aux parents employeurs de déduire 50 % des sommes engagées du montant de leurs impôts. Ce sera l’occasion pour l’association de majorer ses tarifs, et de couvrir ainsi les dépenses salariales.
Toujours en 2004, il obtient un numéro d’organisme de formation en entreprise, permettant d’être rémunéré par les fonds de formation. La même année, l’association embauche David Ricordel en tant que premier salarié, en CDD à temps partiel, rémunéré par chèque emploi associatif. Puis, en août 2005, c’est l’embauche d’un professeur, toujours à temps partiel. Enfin, depuis octobre 2005, David Ricordel bénéficie d’un contrat à temps plein aidé (CAE) qui permet l’exonération partielle des charges sociales et une aide financière de l’État. En janvier 2006, une antenne est créée à Montauban, pour laquelle l’association sous-loue une salle en centre-ville. L’association emploie alors une troisième personne pour assurer une nouvelle demande : les cours d’anglais pour adultes en groupes, facturés au même tarif que le soutien scolaire. Désormais des cours d’informatique en entreprise sont aussi proposés pour 60 € de l’heure. Pour convaincre les familles non imposables de faire appel à ses services, et compenser le fait qu’elles ne tirent actuellement aucun bénéfice de la réduction d’impôt de 50 % accordée aux parents, l’association va faire une demande de subvention à leur égard.
Comme pour toute activité, il faut aussi se faire connaître. En plus du bouche-à-oreille qui commence à bien fonctionner, David Ricordel vient d’éditer 40 000 prospectus (pour 3 800 € car il a fallu réimprimer la totalité des prospectus suite à une coquille non décelée sur le bon à tirer !) qu’il va lui-même distribuer dans les boîtes aux lettres de Montauban. Comme tout jeune créateur d’entreprise, il sait qu’aux heures de production (les cours) il faut ajouter le double d’heures de gestion (administration, marketing, etc.). Ces contraintes nécessitent un grand investissement personnel. L’activité est fluctuante au cours de l’année : elle démarre vers le mois de septembre pour s’intensifier progressivement au cours de l’année scolaire et finir par une forte demande fin juin. Puis c’est le calme plat des vacances d’été. Anticiper ces fluctuations est indispensable pour réguler les rentrées d’argent, d’où l’impératif de multiactivités.
C’est aussi au fil du temps que M. Ricordel réalise que la gestion d’une association est aussi lourde et compliquée administrativement que celle d’une entreprise, ce qui lui fait douter parfois de son choix initial de fonctionnement. Pour compléter sa politique de communication, il achète un numéro Azur. Cela lui coûte 18 e par mois et permet à tous les interlocuteurs de l’appeler au tarif local quel que soit leur lieu d’appel. Ce numéro présente aussi un bénéfice secondaire en donnant une meilleure crédibilité à l’image de marque : on a l’impression d’avoir affaire à une « grande » entreprise. Enfin, Solus étant installé aux confins de trois départements, ce numéro « anonyme » ne la situe pas géographiquement, on n’hésite pas à téléphoner puisque l’on ne sait pas si le prestataire est éloigné ou proche de chez soi. Pour conclure, on peut pointer que David Ricordel est dans le parcours type du jeune cadre d’entreprise privée « créateur d’entreprise ». Il utilise ses indemnités Assedic pour faire face aux premiers mois sans salaire. Il n’a pas les moyens de prendre les risques financiers à la hauteur de ses ambitions de chef d’entreprise. Il se sait tributaire d’un autofinancement obligatoire et, bien conseillé par une association locale d’aide à la création d’entreprise, il construit patiemment son activité, misant sur la durée pour la pérenniser. Dans le courant de l’année 2006, la prochaine étape sera de créer la SARL qui va lui permettre de se développer à plus grande échelle. Le grand bassin toulousain est une région économique privilégiée et M. Ricordel sait que sa constance va porter ses fruits.

3 - Viadom, Quinze ans d’expérience dans les services à domicile

En 1990, un créateur d’entreprise invente un concept inexploré : la coiffure à domicile. Il crée la société Soncad (Société d’organisation nationale de la coiffure à domicile). De ce point de départ, Philippe Bosc construira le premier groupe de prestations de services à domicile : Viadom, représenté aujourd’hui sur tout le territoire français au travers d’une quarantaine de sociétés. Entré en 1996 dans le groupe, M. Christian Lehr a assuré la direction générale de l’activité de coiffure à domicile, avant de prendre la présidence du groupe au départ de M. Bosc en 2002. N°1 européen de la coiffure sur le lieu de vie, au domicile mais aussi à l’hôpital, en maison de retraite ou sur le lieu de travail, Viadom a ajouté progressivement d’autres activités à l’offre initiale : l’esthétique à domicile, un service d’aide ménagère et un service d’entretien du jardin. Selon les prestations proposées, les clients peuvent ou non profiter des allègements prévus par les dispositions légales sur les services à la personne bénéficiant d’un agrément (personnes de plus de 70 ans, ou dépendantes, etc.). Chaque secteur de services dispose d’une unique plate-forme d’appels téléphoniques avec un numéro Indigo. Les 40 employés du siège social de Mulhouse gèrent ainsi l’ensemble des activités des 3 700 salariés de Viadom. Ces salariés, bénéficiant tous d’un CDI dont ils fixent eux-mêmes le nombre d’heures à rétribuer, sont recrutés par le biais de l’ANPE, du site Internet de la société, lors de campagnes de recrutement dans les journaux, ou contactés directement au sein de leur activité. Ils peuvent tous bénéficier des programmes de formation interne, à la fois sur les méthodes de base de chaque activité mais surtout sur les actes techniques qu’imposent les services aux personnes âgées ou dépendantes, qu’elles soient encore à leur domicile, en milieu hospitalier ou en résidence médicalisée. Mobiliser une femme lourdement invalide dans un fauteuil roulant ou alitée nécessite des gestes précis qui ne s’inventent pas. Outre ces formations internes, Viadom met à disposition de ses salariés toutes les gammes de produits nécessaires à l’exercice de leur métier : produits capillaires, de soins, matériel de coiffure, etc. Pour faciliter et sécuriser les déplacements de ses salariés en esthétique et en coiffure, Viadom met à leur disposition des voitures neuves entièrement prises en charge par la société (location du véhicule, assurance, entretien et carburant). Cette professionnalisation de tout l’environnement du service à domicile permet à Viadom de réaliser un chiffre d’affaires, toutes sociétés confondues, de 40 millions d’euros, pour plus de 2 millions de prestations assurées auprès de 400 000 foyers. Succès qui peut en faire rêver plus d’un ! Pour autant, Christian Lehr, par ailleurs Vice Président du SEPS (Syndicat des professionnels des services à la personne), s’il est fier de la belle réussite de son entreprise, met en garde les futurs créateurs qui imaginent trop souvent les services à la personne comme une activité relativement facile d’accès. Selon lui, cette apparente facilité cache en fait une grande complexité : outre le cadre légal très réglementé, les savoir-faire requis, les politiques « qualité » à instaurer, le créateur d’une entreprise nécessitant de la main-d’oeuvre devra aussi faire face à des dépenses salariales considérables. Pour ces raisons, de nombreux projets dont il a connaissance par le biais du SEPS lui semblent voués à l’échec pour insuffisance de fonds propres et de garanties. Toutefois, Mr Lehr reste convaincu que le secteur des services à la personne réserve un bel avenir à la création d’entreprises, notamment en raison du déficit d’offres actuellement proposées sur le territoire.

4 - Ceka Services, le sens du service au féminin

Ceka Services propose quatre prestations de services à la personne à domicile : garde d’enfants, aide aux personnes âgées, tâches ménagères et petit bricolage et jardinage.
Pas de doute, Cendrine Guilbert et Karen Kolodziej ont la fibre créatrice dans le sang. En 2002, ces deux jeunes mères de famille, de 31 et 32 ans se croisent devant le portail de l’école. Elles fréquentent le même club de gym où un jour, excédée, Karen lance à la cantonade : « J’en ai assez de voir ma vie professionnelle dépendre du bon vouloir des nounous de mes enfants. Je ferais mieux de créer ma propre structure de garde à domicile et j’aurais moins de problème... » Et Cendrine de renchérir : « J’ai les mêmes soucis de services à domicile avec ma grand-mère, c’est vrai, on ferait mieux de créer quelque chose ! ...» Sans se connaître, leurs idées se rejoignent et, le soir même, les deux jeunes femmes se retrouvent après le dîner et commencent à plancher sur un projet de services à domicile. Six mois plus tard, le 30 juillet 2003, la SARL est créée et Ceka Services voit le jour. Aujourd’hui, elles sont devenues les deux meilleures amies du monde et leur complémentarité s’épanouit dans leur activité.
Du projet à leur réussite actuelle, reprenons maintenant le détail de ce parcours. Toutes deux habitent Thomery, un petit village de Seine-et-Marne à proximité des villes de Fontainebleau (5 km), Montereau et Nemours. Cendrine a un poste dans l’audiovisuel, sous statut d’intermittente du spectacle. Karen travaille à la chambre de commerce de Fontainebleau au service formation, où elle fait souvent état de son désir de créer sa propre entreprise, sans toutefois trouver une idée de business qui lui convienne. De plus, elle appréhende de se lancer en solo. Les deux jeunes femmes restent en poste pendant les six mois nécessaires à l’incubation du projet. Elles se retrouvent presque chaque soir chez l’une ou chez l’autre. Elles seront sans cesse soutenues par leurs maris, même si ceux-ci ne prennent aucune part à leur projet. Progressivement, celui-ci se matérialise. Toutes deux veulent proposer les services à domicile dont elles rêvent pour elles-mêmes : la garde des enfants, l’aide pour s’occuper de leurs parents âgés, l’entretien de la maison, les petits bricolages de dépannage et enfin l’entretien du jardin. C’est donc en fonction de leurs attentes personnelles qu’elles vont créer les services qui y répondent. Elles se documentent d’abord : livres nécessaires, études et chiffres. Elles ne connaissent rien à la comptabilité mais montent un plan de financement (aujourd’hui, Karen s’est découvert un goût pour la comptabilité et c’est elle qui la fait au sein de la société). Pour leur étude de marché, elles établissent un questionnaire qu’elles proposent dans les lieux de passage des villes avoisinantes. Elles trouveront une aide substantielle auprès de l’APCE. Sans fonds propres, elles parviennent à réunir 7 500 € (le capital social de la SARL) auprès de leurs deux familles. Elles retirent 1 500 € d’une brocante locale où elles vendent tout ce qu’elles peuvent. Et se lancent à la recherche de financements. Elles trouvent auprès d’une banquière une oreille sensible à leur projet et à la solidarité féminine, et décrochent un prêt de 8 000 €, puis obtiennent dans la foulée un prêt à la création d’entreprise (PCE) de 8 000 €. Leur projet remporte le deuxième prix au concours de création d’entreprise de l’APCE. Toutes les dépenses sont faites à l’économie : le siège social au domicile au début puis un local dans Thomery (s’installer en centre-ville de Fontainebleau a été envisagé puis abandonné en raison du coût élevé des locaux), le mobilier de récupération, etc. Il n’y a que l’équipement informatique sur lequel les dirigeantes ne lésinent pas : elles installent d’emblée les logiciels de gestion comptable et commerciale, de paye et de planning. Dans le budget de fonctionnement, les principales dépenses (outre les salaires) se font dans les assurances pour les salariés : assurances des temps de transport et pour le travail au domicile des clients. Elles se fixent un impératif : obtenir l’agrément qualité pour démarrer leur activité. Elles en font la demande dès la création de la SARL, et l’obtiennent le 27 novembre 2003. Dès ce jour, elles commencent à exercer. Elles répondent « oui » à toutes les demandes et vont elles-mêmes accomplir les prestations au domicile de leurs premiers clients. Puis c’est l’embauche d’une salariée à temps partiel : 4 heures prévues dans le mois..... transformées en temps plein dès la fin du premier mois. Pour se faire connaître, elles distribuent 6 000 prospectus chez les commerçants dans un périmètre de 30 km autour de Thomery, et s’inscrivent sur les pages jaunes. Elles constatent très vite que la publicité dans la presse ne rapporte rien et abandonnent rapidement ce vecteur de communication. L’activité progresse à grands pas, puisque les premiers temps les deux jeunes femmes observent un doublement des heures chaque mois, et passent de 0 à 30 salariés en 18 mois. La société assure aujourd’hui en moyenne mensuelle 2 000 heures de prestation par mois délivrées par 27 employés à domicile. Ces heures sont vendues entre 18,50 et 25 € et jusqu’à 30 € pour le jardinage bricolage, soit un chiffre d’affaires d’environ 450 000 €. Avec l’agrément qualité, certains publics peuvent déduire de leurs impôts une partie des sommes engagées, ce dont Ceka Services se prévaut dans son argumentaire commercial. Les prévisions sont dépassées d’année en année et les jeunes femmes font aujourd’hui une pause dans le développement pour renforcer la maîtrise de leurs activités.
Ce parcours exemplaire n’est pas exempt de difficultés. Citons tout d’abord le problème du recrutement : aux premières campagnes faites au travers de la presse, répondent des centaines (!) de candidatures. Le temps passé à la sélection est très important. Karen et Cendrine appliquent dans leur sélection l’éthique qui sous-tend en permanence leur activité : que les candidats soient aptes à faire preuve de proximité avec la clientèle, de disponibilité, de qualités de coeur et de courage. Elles savent par expérience que les métiers concernés sont difficiles à assumer physiquement et psychologiquement. Et elles rajoutent une qualité pour elles indispensable : la gentillesse. Les profils recherchés sont soit des auxiliaires de vie (avec diplôme pour l’aide aux personnes âgées ou dépendantes), soit des aides ménagères. Elles privilégient les capacités d’adaptation et d’acquisition des compétences plutôt que les seuls critères de formation et de diplôme. Privilégiant l’écoute et le respect, Karen et Cendrine assurent une qualité de travail à chaque employé : horaires aménagés, temps partiel choisi, adaptation à la vie familiale de chacun. Aujourd’hui, elles évitent les campagnes par voie de presse et recrutent par le biais de l’ANPE locale dont une interlocutrice a su cerner exactement leur demande et leur envoie les candidats auxquels elle propose une formation au métier d’auxiliaire de vie. L’ANPE leur adresse aussi des postulants au métier de services qui viennent tester leurs motivations et aptitudes au sein de leur structure : une façon de vérifier si le métier leur convient.
L’autre difficulté a été de se faire une place dans un secteur encore très accaparé par le monde associatif. Ceka Services est parvenu à imposer sa visibilité, jusqu’à être partenaire de la DDASSMA, qui gère l’attribution de l’Apa sur le département. Figurer sur la liste des organismes agréés leur donne accès aux prescriptions accordées aux publics concernés par cette allocation.
La dernière difficulté est le temps consacré à l’entreprise par ses deux cogérantes. L’agrément qualité implique un fonctionnement 24 h sur 24 et 7 jours sur 7 dont elles assurent encore la plupart du temps les permanences. Certes, l’égalité de leurs compétences leur permet de s’octroyer du temps libre en alternance, mais la progression de l’activité de l’entreprise leur demande encore beaucoup de présence. Elles ont toujours pris leurs week-ends, mais n’ont jamais compté leurs heures en semaine, et il leur arrive encore aujourd’hui de rejoindre leur bureau une fois le dîner terminé. Leurs familles se sont faites à ce rythme trépidant, mais elles reconnaissent atteindre les limites du temps consacré à l’entreprise. Elles ont embauché une assistante polyvalente, qui devient progressivement leur alter ego et qui pourra les remplacer si elles s’absentent. Et leur permettra d’organiser le nouveau développement de Ceka Services : créer des agences indépendantes sous la même enseigne et introduire de nouveaux services en complément de ceux existants. Et peut-être se lancer ensuite dans un nouveau projet de création d’entreprise...



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